Il était déjà 8 heures 30 et comme tous les matins, j’étais en retard. Je voyais au loin les derniers élèves rentrer dans cette immense cour banale, sans grand intérêt, et encore une fois, la grille se referma devant mes yeux. Finalement, une heure plus tard, j’étais comme tout le monde sagement assis à regarder Mr Vicat préparer son cours avec nervosité. Personne n’avait jamais réussi à le cerner, celui-là, et lui n’avait d’ailleurs jamais eu confiance en nous.

Benoît me lança alors sur ma table un papier, suivi d’un sourire. Je lui lançai un regard avant d’ouvrir la boulette de papier. " Eh, Gabriel, tu pourrais m’aider après les cours pour le devoir de maths ? S’il te plaît, je n’ai rien compris...". Ce n’était pas la première fois que des élèves me demandaient mon aide, et ça ne me dérangeait pas plus que ça. En fait, j’étais simplement habitué, je crois. " D’accord, si tu veux, on se rejoint devant chez moi à 17 heures 30. " A vrai dire, ce soir-là, j’avais prévu de passer du temps avec ma mère à la maison, ça faisait longtemps qu’on ne s’était pas retrouvés seuls juste tous les deux, comme autrefois. Mais je crois que l’aide, pour ceux qui en ont besoin, est plus importante pour l’instant.

La sonnerie retentit, je rangeai rapidement mes affaires, et allai retrouver Benoît avec un sourire d’ange, comme à chaque fois. Il m’attendait dans un petit restaurant situé juste en bas de mon appartement. Il avait tout préparé, et apparemment, il ne manquait plus que moi. Nous restâmes à bavarder et à travailler pendant une petite heure, puis je décidai de repartir chez moi retrouver ma mère qui préparait tranquillement le dîner.

Quelques minutes plus tard, j’étais encore abasourdi par ce que je venais d’entendre. Je n’en revenais pas. Ma mère venait de m’annoncer que l’hôpital lui avait envoyé une lettre l’informant qu’elle souffrait d’un cancer aux poumons. Je ne savais pas quoi faire, mais j’étais sûr qu’il fallait que je l’aide. Il fallait que je l’aide, comme toutes ces personnes.

" Maman, je te promets que je serai là, à coté de toi, toujours.

- J’en suis sûre, mon ange. "

Je menais alors, pendant un mois, un combat acharné, et elle aussi. Nous étions forts depuis le début, mais je sentais qu’elle ne tiendrait plus très longtemps. Un soir, j’entendis à côté les mots prononcés par le médecin, et je pus lire sur les lèvres de ma mère toute la joie qu’elle n’avait plus depuis longtemps. Je compris et je la pris alors dans mes bras affectueusement.

" Mon chéri, comment as-tu fait ? J’aimerais savoir... C’est grâce à toi que j’en suis là.

- C’est grâce à toi aussi maman, tu sais !

- Non, je sais que tu y as mis tout ton cœur, dans ce combat depuis ces longues semaines. Dis-moi, je t’en prie, comment as-tu fait ?